samedi 27 novembre 2010

CHOC DES GÉNÉRATIONS: MÉCONTENTEMENT, RAGE, DÉSESPOIR, IMPUISSANCE ET INDIFFÉRENCE

Le choc des générations a toujours été source de conflit. Chaque génération a réagi contre sa précédente: la littérature, la peinture et la musique ont proprement montré cette lutte sans merci. Dans l’art, chaque mouvement réagit contre les excès de la précédente et, dans la vie, chaque génération combats durement pour créer sa propre vision de la réalité -souvent antagonique à celle de ses prédécesseurs- et pour définir ses propres objectifs. C’est la vie!
Le décalage entre une génération et sa postérieure, néanmoins, dépend de plusieurs et diverses facteurs historiques, sociaux et économiques. Ainsi, les Ivis, c'est-à-dire, les Inuits de l’est de Groenland, croyaient il y a 100 ans qu’ils étaient seuls dans le monde. Aujourd’hui, seulement un siècle plus tard, ils habitent dans des maisons préfabriquées, ils ont accès à Internet et ils ont découvert la poêle et le tourisme. Pour toutes ces raisons, dans ce cas là on devrait plutôt parler de choc générationnel: trois générations ont suffit pour passer de la préhistoire à l’ère de la globalisation. Ander Izagirre, qui a gagné le prix Mikel Essery pour son travail « Groenlandia cruje », avoue que les Ivis ont payé cher ce brusque changement: la violence, l’alcoolisme et le taux de suicides entre les jeunes sont montés en flèche.
Évaluer les changements dans la société basque en fonction des paramètres vertigineux établis pour les Ivis serait prétentieux, mais, de toute façon, on pourrait constater que le saut entre ma génération et celle de mes grands parents a été considérable. Les parents de mon père étaient agriculteurs et ceux de ma mère bouchers. Ils subsistaient avec ce que la terre et la nature leur donnaient; du temps de nos grands-parents, le secteur primaire national nourrissait encore la plupart de la population. Ils ne sont jamais allés à l’école et même s’ils connaissaient l’industrie et ils étaient en contact avec le monde ouvrier, leur morale et pensée étaient complètement chrétiennes. Pourtant, ils savaient interpréter les signes de la nature et des animaux, pratiquer la culture des pommes de terre ou des haricots, reconnaître le temps qu’il allait faire à l’avance; ils avaient un vocabulaire très vaste en ce qui concerne l’agriculture, le bétail et la nature en général; ils ont dû apprendre les techniques du commerce et une nouvelle langue (l’espagnol ceux d’Hegoalde et le français ceux d’Iparralde) pour pouvoir vendre leur produit; et, finalement, ils étaient d’immenses bibliothèques de la sagesse populaire.
Mes grands parents ont fait un grand effort pour transmettre toutes leurs valeurs à mes parents: sacrifice, travail, famille, mariage, religion, civisme, respect. Et, qui plus est: ils se sont dévoués pour leur offrir une bonne éducation. Mes deux parents ont un diplôme universitaire. En fait, leur génération (celle qui était né dans les années 50) était la première qui a pu accéder en masse à l’université.
De ce fait, le choc entre la génération de mes grands-parents et celle de mes parents était prévisible. Sans vouloir être simpliste, j’oserai dire que quatre éléments furent décisifs: l’éducation universitaire, la télévision, le rock’n’roll et, surtout, la prise de conscience politique. Le Pays Basque du sud était sous la dictature sanglante et immobiliste de Franco et, pour la nouvelle jeunesse, il était impossible de ne pas réagir face à des décades d’oppression et de silence. En plus, le monde vivait des jours de grande effervescence politique: la révolution cubaine, la guerre d’Algérie, le printemps de Prague, la guerre de Vietnam, les groupes des guérilleros (l’I.R.A. en Irlande du Nord, la R.A.F. dans la R.F.A. –ses sigles: pure coïncidence ou jeu de mot volontaire?–, les Tupamaros en Uruguay, la M-19 en Colombie, les Brigades rouges en Italie, Action directe et le F.L.N.C. en France), mai 68 français et le coup d’État de Pinochet au Chili a laissé des traces profondes dans leur imaginaire politique.
Les adultes ne comprenaient guère la nouvelle jeunesse. S’il fallait, la jeunesse était prête à lutter et à déclarer la guerre à l’État. Face aux premiers assassinats de l’E.T.A. (l’assassinat de Meliton Manzanas –collaborateur de la Gestapo pendant la II. Guerre Mondiale, chef de la police franquiste de Gipuzkoa et brutal tortionnaire– ou celle de Luis Carrero Blanco –président du gouvernement espagnol franquiste–), la société basque était divisée. Les plus âgés, ceux qui ont connu la guerre, refusaient la violence. Pour eux, la politique n’était qu’une source de problèmes et de malheurs. Par contre, à cause de la féroce répression, la majorité de la jeunesse, plus ou moins, justifiait le besoin d’une réponse armée. En conséquence, ils se sont engagés dans la politique, car pour eux c’était la seule façon de changer la société.
Des décades et décades de violence extrême et tortures systématiques ont suivi. Au cours de ces années, la violence a accaparé le regard de tout le monde; en revanche, la politique, l’art ou la révolution sexuelle on été mis au second plan. Mais, au fur et à mesure que les années s’écoulaient, le compromis et l’intérêt pour la politique, signe de la génération précédente, a été dilué et remplacé par la désillusion, par la frustration et, surtout, par l’indifférence. Même si l’on reconnaît les grandes avancées de la génération précédente (le droit à l’avortement, le divorce, les syndicats, le mouvement des insoumis, les avancées sociales, les droits des homosexuelles, la Sécurité sociale, la démocratie –même s’il est de bas qualité–), ma génération se sent indifférente. On voudrait changer beaucoup de choses, mais on manque de références.
En plus, la communication avec nos parents n’est pas fluide. Nos intérêts divergent. Le sexe, théoriquement, n’est pas tabou, mais personne n’en parle clairement et avec totale confiance. Leurs valeurs (sacrifice, travail, famille, mariage, religion, civisme, respect) n’ont pas trop changé; ils continuent, comme leurs parents, répétant le sermon ancestral: il faut se sacrifier; il faut travailler dur; la vie, ce n’est pas le Pérou!; il faut souffrir pour savoir qu’est-ce que c’est la satisfaction, etc.
Je suis d’accord. Mais est-ce que dans cette vie il n’y a que cela? Quand est-ce qu’on va apprendre à prendre du plaisir sans être rongé par le remords?
L’art pour l’art. La diversion pour la diversion. Le plaisir pour le plaisir. Cela est inconcevable, par exemple, à Donostia, une ville exclusivement consacrée au tourisme et à la gastronomie de grand standing. Une ville qui ne fait rien pour soutenir les groupes qui osent jouer des accords un peu plus durs que ceux de Mikel Erentxun ou La Oreja de Van Gogh. Un désert créatif, une ville calme et apaisée, un trou noir pour l’inquiétude culturelle et pour l’énergie de la jeunesse. Bref: une ville pour le troisième âge et pour les parents qui veulent se promener avec leurs enfants.
Le Pays Basque est ennuyant. Il n’y a rien qui motive vraiment la jeunesse. Les bars? Les amis? La télé? Le shopping? La politique? Les «40 principales»? Rien. Même les drogues et, surtout, les toxicomanes, sont ennuyeux. On s’habille avec des écharpes palestiniennes multicolores, C&A utilise l’image de Che Guevara pour la saison estivale, on permet que les plus grands journaux publient l’avis de décès de Franco et de Primo de Rivera sans protester.
J’ai peur d’être pessimiste et démagogue, mais une fois que j’ai donné libre cours à ma colère je ne peux pas m’arrêter. On est gouvernés par des soixante-huitards qui ont couvert et encouragé les crimes et les tortures les plus atroces, par des soixante-huitards amants de la realpolitik et de la pornographie mémorielle; on ne réagit plus aux attentats et menaces de l’E.T.A.; plus qu’un héritage apprécié, stimulant et chargé de futur, la culture est devenu un autre élément du programme touristique.
Et avant qu’on ait essayé de changer, de réagir, la génération précédente nous a déjà convaincu de ne rien faire. N’y-a-t-il vraiment rien à faire ? Est-on condamnés à regarder l’effondrement de tout le système comme des vaches qui regardent passer le train ?
J’entends la voix de mon père me disant tu verras, tu verras...

POST SCRIPTUM
Nire idazlan honek asko zor dio Beñat Sarasolaren «Gure belaunaldia» poemari eta orain dela gutxi Argian argitaratu zen Koldo Almandozi egindako elkarrizketa labur bati (http://www.argia.com/albistea/koldo-almandoz-orokorrean-ez-dut-jendea-maite-2):

GURE BELAUNALDIA
Beñat Sarasola, 2007

Gure belaunaldiak ez du deus balio, gure belaunaldia Aginako zero bat da. Ezin izan ditugu gurasoak akabatu; etxetik alde egin, komuna hippie batera joan. Gure gurasoek ulertu egin nahi izan gaituzte, eurek lotutako txirriak erre ditugu, gure alde jarri, gure bandora pasa dira. Irakasleek ikastoletan heziketa teknika modernoenak erabili dituzte gurekin; jolasak egin ditugu, drogen inguruan mintzatu gara, larrutan egiten irakatsi digute ia. Gu iristerako Historia amaiturik zegoen eta Artea, berriz, gure aurrekoek hil zuten. Dena dago honezkero idatzirik, ez da existitzen eskola literariorik haien kontra joateko, baina hala ere ezin konta ahala literatur sari eta beka antolatzen dizkigute gure karrera literarioak promozionatzeko. Utopia eta ideologiek ere, bestetik, ez dute lekurik gaur egun. Gure belaunaldiko inor ez da eromenez, gosez akabatuko. Modelo eta futbolariek tatuajeak eramaten dituzte euren errebeldiaren erakusgai, C&A-k Che Guevararen irudia erabiltzen du udaberriko denboraldirako. Ez dugu katekesirik egin, ezin izan gara apaizen kontra oldartu. Lanean, Giza Baliabideen departamentuak laguntzen gaitu, langileek brainstormingak egiten ditugu enpresaren kudeaketa hobetzeko, sindikatuek babesten gaituzte euren konbenio kolektiboen bitartez. Gure belaunaldiak, gainera, ez du diktadurarik ezagutu, ez dugu demokrazia besterik bizi izan. Gure belaunaldiak erreklamazio orriak ditu eskura bere kexak bideratzeko. Gure belaunaldia...

© Beñat Sarasola

2 commentaires:

  1. Passons les 2 3 fautes d'orthographe, c'est très intéressant quand même tu écrit plutôt pas mal quand même !
    Petite critique tout de même il est vrai que notre génération est un peu apathique mais de là à dire que tout est ennuyeux je suis pas trop d'accord, il y a quand même des choses très intéressantes notamment dans l'art avec l'art de rue (Banksy par exemple mais y en a plein d'autres).
    Carine

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  2. frantsesa praktikatzeko oso ondo datozkit textutxo hauek jontxu!
    jaja, %70ean ulertu detelakoan nao.azterketara noa ea zer gertatzen den.
    Sartrek bazuen esaldi bat, uste det berea zela, horrelako zerbait zioen: hau ez da bizitzeko historiako belaunaldirik hoberena, baina gure belaunaldia da.
    pesimista ikusten zaitut, lehenengo elur malutak izango dia, jar ezazu musika jarocho pixkat
    jaja
    muxux

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